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  Jusqu'en 1914, le conseil municipal interdit régulièrement, tous les ans,
   
    "... de mener paître les moutons et les oies dans les champs qui étaient ensemencés en blé, pour permettre aux
  indigents et nécessiteux de glaner."
   
 

Le 11 avril 1900, le Conseil refuse, par manque de moyens pécuniaires, de permettre à des ouvriers ou des agriculteurs

d'assister à l'Exposition universelle de Paris.
   
  Nouvel orage, le 6 mai 1900, qui cause de gros dégâts à l'église et à l'école.
   
  Le 16 juin 1901, le maire expose au conseil que :
   
    "... pour donner satisfaction au désir depuis longtemps exprimé par la population de Montgauguier, j'ai fait
  dresser... un plan et un devis d'un bassin-lavoir avec puits et pompe, qui serait établi au Bourg-Bernard... La dépense s'élèverait à 1 625 F (50 F pour l'achat du terrain et 1 575 F pour la construction de l'ouvrage)."
   
  La municipalité contracte un emprunt de 1 200 F. L'année suivante la dépense réelle se montera à 2 275 F et la commune
portera son emprunt à 2 000 F sur 15 ans, à un taux de 3,75 %.
   
  Ce lavoir est maintenant en ruine, mais dans notre enfance, nous allions souvent tourner la roue qui actionnait la pompe
(voir photo). Le 30 juin 1901, le conseil général invite le conseil municipal de Montgauguier :
   
    "à faire connaître les sacrifices que la commune serait disposée à consentir pour la création d'un service
  automobile d'autobus traversant le canton."
   
  Ce n'est que le 6 novembre 1907 que le Conseil votera une subvention de 50 F pour l'établissement de la ligne d'autobus
Poitiers-Thénezay, par Quinçay, Villiers, Champigny, Vouzailles, Maisonneuve, Cherves et une deuxième de 50 F pour celle de Thénezay-Richelieu par Maisonneuve, Mirebeau, Lencloître.
   
  Le 15 juin 1902, à la suite d'une consultation du préfet sur une ligne de chemin de fer de Mirebeau à Chalandray ou à
Thénezay, le Conseil :
   
    "... reconnaît que celle qui aurait le plus d'avantages est celle de Mirebeau à Chalandray, passant par
  Cuhon, Maisonneuve, La Touche, Seran, avec gare à La Mothe-Bureau. Il offre comme quote-part de la commune, dans la dépense à engager, tout le terrain nécessaire pour son établissement dans la traversée de la commune de Montgauguier."
   
  L'affaire n'aura pas de suite
   
  Le 25 juin 1905 :
   
    "Dans le but d'agrandir la place publique à Maisonneuve, Emile Texereau, instituteur, s'engage à vendre
  à la commune un immeuble... ayant servi autrefois de classe, sauf son droit de puisage qu'il se réserve au puits existant sur le terrain commun avec Auguste Bonnin, et ce moyennant 900 F."
   
  La proposition est acceptée. L'ancienne maison d'école sera ensuite démolie et le puits conservé jusqu'à une date
récente, sur la place de l'église (voir photo).
   
  Jusque longtemps après la Première guerre mondiale, les habitants de la commune étaient imposés d'une taxe vicinale
pour 1''entretien des chemins. Ils pouvaient la payer en nature, solution *qu'ils choisissaient presque toujours. Voici en 1905, les tarifs de conversion en tâche de cette prestation obligatoire :
 
  Fouille terre ordinaire 0,30 F le m3  
  Fouille terre forte et pierraille 0,45 F le m3  
  Fouille roche tendre 1,00 F le m3  
  Charge ou décharge à la pelle 0,30 F le m3  
  Ramassage cailloux dans les champs 1,10 F le m3  
  Extraction pierre ou silex 1,20 F le m3  
  Extraction granit 1,50 F le m3  
  Cassage cailloux calcaire 1,40 F le m3  
  Cassage silex 2,50 F le m3  
  Cassage granit 3,00 F le m3  
  Transport à la brouette (jusqu'à 90 m) 0,20 F le m3  
  Transport en voiture, pour le 1er km 0,40 F le m3  
  Transport en voiture pour chaque km en sus 0,065 F le m3  
       
  Le 2 juin 1907  
 
    "Le maire expose au Conseil que, depuis de nombreuses années, tous les services et monuments publics de
  la commune de Montgauguier (mairie, écoles, bureau de poste, église...) sont réunis à Maisonneuve, village le plus important de la commune, et qui possède à lui seul, une population agglomérée de 446 habitants sur 540 que compte la commune de Montgauguier, tandis que le hameau de Montgauguier, considéré nominalement comme le chef-lieu de la commune, ne comprend que quatre maisons et douze habitants, est situé à l'une des extrémités de la commune et à près de deux kilomètres du lieu où se trouvent établis tous les services publics. Il y aurait lieu pour répondre au voeu de la population de solliciter le changement de nom de ladite commune.
    Le conseil municipal se range entièrement à la proposition du maire et demande... que la commune de
  Montgauguier prenne à l'avenir le nom de commune de Maisonneuve."
   
  Cette demande, qui arrive avec près de quarante ans de retard, est rapidement acceptée au début de 1908, puisque le 12
mai de cette année-là, le maire écrira pour la première fois sur le registre : "Nous, soussigné, maire de Maisonneuve..."
   
  Le 17 février 1913, la commune achète à Emmanuel Métais "une bande de terrain de 7 m x 0,60 m avec droit de fixer sur
le mur de sa maison un cadre destiné à recevoir les affiches." Ce cadre, devant lequel se sont arrêtées des générations d'habitants de Maisonneuve, a été récemment désaffecté. Avant 1905, les documents officiels étaient placardés sur le mur de l'ancienne école appartenant à Emile Texereau et de 1905 à 1913 sur celui de la maison de l'instituteur qui était secrétaire de mairie (voir photo).
   
  En 1914, la population de la commune est mobilisée pour la préparation d'une grande fête en l'honneur de Jeanne d'Arc,
qui se déroule au printemps. A travers tout le village, une foule immense peut admirer plusieurs chars fleuris portant chacun son bûcher et son héroïne . Comme partout en France, notre commune va payer un énorme tribut dès le début de la Première guerre mondiale. Dans les cinq derniers mois de 1914, qui sont les premiers de la guerre, 12 soldats sont tués sur les 27 qui y laisseront leur vie jusqu'à l'armistice de 1918. La population est hébétée par ce carnage et chacun tremble lorsqu'il rencontre François Laurentin (célèbre par ses recherches sur le mouvement perpétuel, qu'il effectue dans sa cave depuis très longtemps sans se décourager) ou Louis Huet qui remplacent le maire et ont le triste privilège d'annoncer la fatale nouvelle aux familles (le propre fils du dernier décédera lui-même peu avant la fin de la guerre). Lès deux hommes en arrivent à ne plus oser se rendre à 1'intérieur des maisons, sachant la terreur que leur arrivée inspire. Les femmes sont obligées de remplacer les hommes en particulier dans les champs où elles font les gros travaux avec l'aide des œufs, les chevaux ayant été pris par l'armée.
   
  Le 15 février 1915, la municipalité se trouve dans l'impossibilité de faire réparer les chemins vicinaux "par suite de la
réquisition par l'autorité militaire de la plupart des animaux qui existaient chez les propriétaires." Pendant la guerre, tous les travaux d'intérêt public sont reportés, par manque d'artisans. Madame Texereau, institutrice, fabrique à l'école, avec ses élèves, de la charpie pour panser les soldats blessés.
   
  Le 23 janvier 1921, en réponse à une demande de Xavier Martin, descendant de Louis Martin et alors conseiller
municipal "de se rendre acquéreur de la partie inutilisée du chemin communal traversant son domaine à La Mothe-Bureau", le conseil municipal déclare :
   
    "Considérant que cette partie du chemin ne semble avoir été établie que pour faciliter aux personnes qui
  voulaient mener moudre leur grain, l'accès du moulin de La Mothe, que ce moulin ayant disparu depuis une cinquantaine d'années, le chemin est... depuis longtemps inutilisé, et n'est susceptible de rendre aucun service, le Conseil décide de vendre le chemin à Xavier Martin au prix de 700 F."
   
  Le 11 Février 1922, le conseil municipal vote un crédit de 2 950 F pour changer la couverture très ancienne de l'église,
l'ardoise remplaçant la tuile.
   
  Le même jour, il décide l'achat, pour 48 F, de 4 tilleuls à planter dans les cours d'écoles, où deux d'entre eux existent
toujours.
   
  Le 2 juin 1927, le Conseil décide, pour éviter les nombreuses erreurs dans la distribution du courrier, dues à ce que "le
vocable de Maisonneuve est très répandu", que la commune s'appellera désormais "Maisonneuve-sur-Dive", et demande au Préfet de faire le nécessaire. L'archiviste départemental, consulté, propose "Maison-Neuve-sur-Dive". Refus du conseil municipal. Le Conseil d'Etat trouve que cette addition :
   
    "... risque de faire acheminer la correspondance dans le Calvados où il existe un fleuve côtier plus
  important que la Dive mirebalaise et portant le même nom, orthographié toutefois avec un "s" final."
   
  Le maire s'étant renseigné à Frontenay-sur-Dive et au Verger-sur-Dive pour savoir si cette objection est fondée, et sur la
réponse négative des maires de ces communes, le conseil municipal de Maisonneuve maintient sa demande. Elle ne sera jamais agréée.
   
  C'est le 10 décembre 1933 que des agriculteurs de Chalandray, Cherves, Maisonneuve et Massognes se réunissent à la
maison d'école de La Touche et décident de créer une coopérative de vente de grains. Les paysans s'associent pour essayer de lutter contre la grave crise de mévente qui frappe le monde agricole à partir de 1930. La coopérative va s'étendre et prospérer; elle possède maintenant un silo sur le territoire de la commune de Maisonneuve.
   
  Le 18 février 1934, un curieux incident agite le Conseil. En voici la relation in extenso, telle qu'elle est portée dans le
registre :
   
    "Monsieur Hilaire Martin prend la parole et pose une question en vue de savoir s'il existe au budget un
  crédit susceptible d'être utilisé pour le cas de chômage. Comme il lui est répondu négativement, il explique que sa demande n'a d'autre objet que d'attirer l'attention sur l'étrange rumeur répandue depuis une ou deux semaines, qu'une indemnité de 9 F par jour est allouée à un tout jeune homme reconnu et traité comme chômeur par la municipalité.
    Avec une indignation véhémente, il montre la perfidie du propagateur de cette assertion mensongère et
  calomnieuse dont le but unique est de jeter la suspicion sur ceux qui sont chargés de la question municipale. Bien qu'elle soit en effet grotesque autant qu'odieuse, cette assertion n'en a pas moins péniblement ému les personnes non initiées aux règles sévères de la comptabilité communale, non informées des justifications auxquelles sont tenus les détenteurs des deniers communaux, pour disposer des fonds strictement limités inscrits au budget, sans avoir le loisir d'en changer l'affectation.
    Unanimement, l'assemblée communale s'associe à cette protestation de l'un de ses membres. Elle a la
  tristesse de se voir contrainte à dénoncer comme un malfaiteur le lâche imposteur, exploiteur anonyme de cette infamie.
  Investis de la confiance des électeurs, les membres du Conseil assurent par là-même l'impérieux devoir
  d'éclairer la population sur la valeur de tels agissements.
    Ils se voient obligés de la mettre en garde contre un plan de campagne qui, par ce fait et des faits
  précédents du même genre également pervers et aussi insensés, s'avère établi systématiquement en vue d'égarer et d'empoisonner l'opinion."
   
  Autres temps, autres mœurs ! La situation a bien changé et les membres d'un conseil municipal actuel riraient bien d'une
si vertueuse indignation.
   
  Mais le 18 novembre 1934, le Préfet demande au maire :
   
    "... d'examiner s'il n'y aurait pas lieu pour la commune de voter un crédit à verser au fonds de chômage
  départemental..."
   
 

Le Conseil répond :

   
    "Considérant qu'il est bien improbable qu'il se produise des cas de chômage à Maisonneuve... que d'autre
  part, les ouvriers susceptibles de manquer de travail, peuvent être employés à des travaux d'utilité publique sur les chemins ruraux..."
   
  et refuse de verser la moindre somme.
   
  Le 3 novembre 1935, le conseil municipal fixe le montant des taxes suivantes :
 
  sur les voitures à 4 roues 20 F
     
  sur les voitures à 2 roues 12 F
     
  sur cheval, mule ou mulet 12 F
 
  La taxe est réduite de moitié pour les voitures et animaux utilisés pour le travail.
   
  Jusqu'à la seconde guerre mondiale, il existait aussi une taxe sur les bicyclettes. Chaque cycliste possédait une "carte"
(comme la vignette automobile actuelle) qu'il était tenu de présenter à toute injonction de la police ou des agents du fisc. Elle était souvent fixée à demeure, soit au cadre dans un petit étui, soit dans la sacoche contenant le matériel de réparation.
   
  La route traversant Maisonneuve ayant été empierrée et cylindrée, le Conseil demande son goudronnage, le 18 février
1935. L'administration refuse, car cette voie n'est pas classée "grand trafic". Et le 12 juin 1936, la municipalité décide de faire goudronner aux frais de la commune toutes les routes "qui longent les maisons" et vote à cet effet un crédit de 5 000 F.
  Le même jour, le maire :
   
    "... explique que, de plus en plus, dans les agglomérations, se généralise l'usage de mettre des signaux
  appropriés pour prévenir les conducteurs automobiles ou autres d'avoir à se tenir attentifs à l'approche de certains points dangereux. Il faut envisager d'apposer des plaques aux endroits propices."
   
  Le 4 avril 1936, décès de Emile Texereau à l'âge de 80 ans.
   
  Le 17 mars 1940, le Conseil décide l'achat d'un montant de 13 000 F de l'immeuble situé devant l'église d'une superficie
de 253 m2 et appartenant aux héritiers d'Emile Villain, ancien cordonnier, "pour aménager la place publique et démasquer l'église". La maison est rapidement détruite et la place ainsi agrandie (voir photo).
   
  On vote aussi un crédit pour planter des arbres le long du mur de la maison Aguillon qui, dorénavant, jouxte la place. Il
n'a donc jamais été utilisé, puisque la haie n'existe pas.
   
  Le 11 février 1941, le conseil municipal propose la création à Maisonneuve d'un marché-foire les 2ème et 4ème
dimanches de chaque mois, avec ouverture à 15 heures (heure allemande). L'autorisation sera accordée, mais le marché peu actif disparaîtra rapidement.
   
  Le 24 février 1944, après en avoir confié l'étude au service du Génie rural, le Conseil propose de "doter la commune
d'une distribution d'eau potable", tout en reconnaissant que "la réalisation demandera peut-être une dizaine d'années".
   
  Pendant la guerre de 1939-1945, la commune participe à l'effort d'aide aux personnes sinistrées : logement des réfugiés
du nord et de l'est, plus tard de Normandie, vote de crédit pour les villes bombardées, parrainage de la ville de Maubeuge, envoi de colis aux prisonniers de guerre, assistance aux familles les plus démunies de ceux-ci.
   
 
 
Hôtel de la Croix Blanche à Vouzailles à la fin du XIXè siècle
   
 
Les "batteries"
La batteuse est mue par une machine à vapeur
alimentée par des briquettes de charbon
   
 
 
Pompe construite en 1902 le long de la route Bourg-Bernard
 
Au premier plan, au milieu, avec un chapeau : René GUYOT
   
  Les femmes des prisonniers sont obligées comme leurs aînées de 1914-1918, de faire les gros travaux, aidées
quelquefois par les hommes qui ont pu échapper à la servitude. Les chevaux ont été réquisitionnés à nouveau.
   
  Le rationnement, causé par le pillage du pays par les occupants, va sévir à Maisonneuve mais, sauf peut-être la première
année où les cultivateurs avaient souvent vendu leur blé avant l'établissement des restrictions, jamais la population de la commune ne manquera de pain et d'aliments de base. Par contre, elle subira le rationnement des denrées qui ne sont pas récoltées sur place et évidemment, des produits industriels, chacun recevant tous les mois sa part de "tickets" représentant une partie de ses besoins.
   
  Notre commune est parfois occupée par des troupes allemandes pendant la guerre, en particulier en 1944 où un atelier de
réparation des chars fonctionne.sous une vaste tente installée sous les arbres le long de la Dive. Le commandant qui habite alors le logement inoccupé des instituteurs se rend régulièrement à une prise d'armes sur la place de l'église. Et comme un jour il a glissé sur une bouse de vache, la population est chargée de nettoyer la rue chaque matin.
   
  A partir de 1943, quelques jeunes sont envoyés en Allemagne pour le STO (service du travail obligatoire).
   
  Le calme règne à Maisonneuve pendant toute la durée de la guerre. Notre commune ne connaît pas les bombardements,
dont la crainte éloigne tout de même de chez eux, certains soirs de l'été 1944, des habitants qui préfèrent coucher à la belle étoile. Notre région, où le terrain nu ne pouvait s'y prêter, n'abrita pas de maquisards. Le seul personnage important de la Résistance qui y séjourna fut sans doute Michel Debré, futur premier ministre, qui fit halte à l'hôtel de Mirebeau au début d'août 1944, se rendant à bicyclette à Angers pour y prendre la fonction de Commissaire de la République (Préfet).
   
  Le 4 novembre 1945, le conseil municipal décide d'accepter le don fait par Pierre Boulin, ancien maire de la commune,
"d'une oeuvre de grande valeur, un beau groupe en bronze massif", représentant "la défense du foyer", et de le placer, comme le propose le donateur, sur la cheminée de la grande salle de la mairie. Cette donation sera effectuée le 28 avril 1946 "en présence du conseil municipal assisté d'une partie de la population". L'oeuvre d'art est donc installée sur la cheminée de la mairie "en vue d'y faire un décor destiné à inspirer l'amour de la Patrie." Les visiteurs peuvent toujours l'admirer à la même place.
   
   
 
EVENEMENTS ET METIERS DISPARUS
   
   
 

A l'automne généralement, on tuait le cochon engraissé à la ferme. Les grands-mères (et les plus jeunes) rivalisaient de

savoir-faire pour confectionner de délicieuses cochonnailles, boudins, andouilles ou sauce à la couenne, dont la seule évocation met l'eau à la bouche des connaisseurs.
   
  Les "batteries" commençaient dès gue l'on avait amené dans la cour les grandes charrettes chargées des gerbes crachées
par la moissonneuve et entassées aussitôt sur le terrain pour les protéger d'une pluie éventuelle. C'était une fête gue les enfants attendaient avec impatience chague année. La batteuse, mue par un moteur à vapeur, plus tard parfois par l'électricité, tirée plutôt par une paire de boeufs plus calmes gue des chevaux pour cette tâche délicate, était installée dans la cour près du gerbier. Les battages pouvaient alors commencer, travaux pénibles dans la poussière et la chaleur, mais prisés des paysans qui y trouvaient l'occasion de travailler et de rire ensemble. Lors des pauses qui entrecoupaient le dur labeur, les enfants "portaient à boire" aux ouvriers et jouaient dans le tas de "ballin". Pendant la dernière guerre, ils étaient chargés de récupérer les cordes en papier entourant les bottes, détachées sur le pailler et lancées sur le sol pour être utilisées à nouveau à la sortie de la presse. On avait imaginé ce procédé pour hisser plus facilement la paille, ces cordes remplaçant la ficelle de sisal qui manguait par suite des restrictions imposées par l'occupant. Les enfants gagnaient à ce travail leurs repas de midi et du soir et une pièce de un ou deux francs. Après la dure journée, le dîner bien arrosé se prolongeait parfois tard et certains compères ne se faisaient guère prier pour raconter des histoires ou entonner des chansons viriles reprises en choeur par l'assemblée. Mais pour les femmes, souvent réunies depuis la veille pour plumer les volailles et préparer de solides repas à ces gaillards, les battages n'étaient pas une fête et elles étaient bien aise de voir partir la batteuse... et les ouvriers, soulagées si tout s'était bien passé.
   
  Les vendanges se déroulaient généralement après le 1er octobre, date de la rentrée scolaire, et les enfants ne pouvaient
donc y participer que le jeudi, alors jour de repos. Juchés sur les charrettes, ils partaient pour la journée et déjeunaient avec les grandes personnes près de la vigne même. Nous avons souvenance d'avoir alors mis plusieurs fois une bouteille à rafraîchir dans la "fontaine au couteau".. Et le soir, quelle joie de se déchaussser et de fouler, les pieds nus dans les "charreaux", la vendange mise ensuite en des tonneaux que l'on viderait après la fermentation. La venue du pressoir qui écrasait les grappes destinées à faire le vin blanc et dont le jus devait fermenter seul sans la râpe, était aussi très attendue.
   
  Les veillées représentaient des moments privilégiés dans la vie à la campagne, pour les enfants comme pour les adultes.
Les longs soirs d'hiver, on se réunissait entre voisins ou amis et on joignait l'utile à l'agréable en "triant" les noix. Celles-ci, cassées auparavant, étaient étalées sur une grande table, et/ tout en discutant, on en récupérait les cerneaux que l'on suspendrait plus tard dans un sac au coin de la cheminée pour les laisser sécher. La soirée se terminait vers minuit par la dégustation de la "rôtie", soupe au pain et au vin chaud (ou à la "piquette").
   
  Une autre grande occupation de la veillée consistait en la confection ou la remise en état des "lignes" à alouettes, longues
ficelles de plusieurs dizaines de mètres de longueur sur lesquelles étaient fixés à quelques centimètres les uns des autres des lacs en poils de queue de cheval que l'on fabriquait en roulant ceux-ci sur la table et en formant une boucle. De temps en temps, on passait les doigts dans la cendre pour éviter que les poils glissent au lieu de rouler. Lorsque la neige recouvrait longuement la campagne, on "tendait" les lignes dans les champs, c'est à dire que l'on faisait un sillon avec le pied pour dégager la terre, on y fixait la ficelle à lacets avec des petits pieux de bois enfoncés dans le sol, puis on y déposait du grain pour attirer les oiseaux affamés. Les volées d'alouettes étaient alors très importantes et nombreuses et on faisait souvent des prises de plusieurs douzaines d'oiseaux par jour. Quelquefois une pie ou un corbeau prisonnier causait de gros dégâts, cassant les lacs ou arrachant les piquets.
   
  Le jour du mardi-gras, les jeunes gens se déguisaient, portant un masque qui effrayait (ou ravissait) les enfants,et allaient
frapper de porte en porte. On leur donnait des crêpes, des "tourtisseaux" ou quelque menue monnaie dans une tirelire qu'ils faisaient tinter joyeusement, insistant longuement devant ceux qui s'obstinaient à ne pas comprendre, ou qui faisaient semblant.
   
  Pendant toute l'année, les enfants pensaient à cette fête, inoubliable pour eux, qu'était l'assemblée. Elle existait de temps
immémorial, puisqu'elle est signalée dans des documents du XVIIème siècle. Chaque famille invitait ses parents des communes voisines qui venaient en voiture à cheval, astiquée pour l'occasion et qui servait rarement. La semaine précédente, on avait installé sur la place du village le "parquet-salon" surmonté d'une bâche pour les danseurs. Ensuite arrivaient les baraques foraines, chevaux de bois, tirs à la carabine, loteries, marchands de bonbons. Et même si les parents étaient souvent bien pauvres, chaque enfant avait tout de même en poche un peu d'argent qui lui permettait de matérialiser son rêve si longtemps entretenu, les grands-parents y ayant participé pour quelgues pièces de monnaie. Il y avait deux bals, l'un l'après-midi, l'autre le soir qui se prolongeait fort tard dans la nuit et où les mères et grands-mères étaient particulièrement mobilisées, assises sur les bancs entourant la piste, papotant en surveillant les danseurs et faisant provision de nouvelles et de supputations sur les mariages futurs, qui alimenteraient leur conversation dans les semaines à venir. Tous les dimanches, il existait une assemblée à faible distance de chaque village car c'était la seule distraction des jeunes gens à la campagne. A la fin du siècle dernier, on s'y rendait à pied, plus tard à bicyclette. La généralisation de l'automobile, qui permettait de se déplacer très vite et plus loin, a sonné le glas des assemblées qui ont disparu dans les années 1970.
   
  Au début du siècle, le mariage était l'occasion d'une grande et longue fête dans nos campagnes. Les parents devaient
d'abord donner leur accord, après avoir pris les renseignements les plus complets sur la famille du futur conjoint. On faisait une véritable enguête préalable, facilitée par le fait que les jeunes gens, qui s'étaient souvent rencontrés dans une assemblée, habitaient la même commune ou des villages proches où les gens se connaissaient. Tout était étudié et soupesé avec soin, l'honorabilité évidemment, la prodigalité (rédhibitoire) ou l'avarice (moins grave), mais aussi les maladies de famille (les poitrinaires faisaient terriblement peur) et surtout les biens apportés par chacun, en particulier le nombre et la qualité des boisselées de terre. Bien des mariages n'ont pu s'accomplir parce que l'un des "futurs" n'apportait pas assez de "champs" dans la corbeille. Les enfants, qui souvent vouvoyaient leurs parents, n'osaient pas passer outre à leur décision. La parole donnée étant le meilleur des contrats, il était rare que l'on en établît un chez le notaire, contrairement à la coutume des siècles passés.
   
  L'accord scellé, il fallait préparer la cérémonie qui avait lieu un samedi dans la maison de la mariée, bien évidemment en
dehors du Carême. Suivant la plus ou moins grande aisance des familles, on louait un parquet-salon que l'on installait dans la cour ou on préparait la fête dans la grange dont les murs étaient tendus de draps piquetés de fleurs.
   
  Les jours précédant le mariage, on était très occupé, car il fallait prévoir la nourriture de souvent cent à deux cents
personnes. On devait respecter la tradition de la bonne "mangeaille", et même les plus modestes savaient, ce jour-là, n'être pas "regardants". Aussi le cochon, les volailles faisaient-ils les frais des préparatifs; on mettait en perce les meilleures barriques, on chauffait le four pour les gâteaux.
   
  La matinée du grand jour, les invités se rassemblaient dans la cour, attendant la mariée qui apparaissait bientôt en robe
blanche, portant une couronne de fleurs d'oranger qui serait conservée la vie entière sous une cloche en verre sur la tablette de la cheminée de la chambre. Le cortège, soigneusement formé par le garçon d'honneur qui avait sa liste toute prête, les enfants devant, ensuite la mariée au bras de son père, puis les couples de jeunes gens, les filles en robe longue, enfin les plus âgés, le marié fermant la marche au bras de sa mère, s'ébranlait et traversait lentement le village, précédé du violoneux et admiré tout le long par les curieux, qui étaient le plus souvent des curieuses faisant provision de commentaires sur les couples et les toilettes.
   
  A la sortie de la mairie, le cortège se reformait pour gagner l'église où des jeunes filles distribuaient le pain bénit qui
permettait de faire patienter les estomacs exigeants. A la porte de l'édifice religieux, la mariée, enfin au bras de son époux, coupait un ruban tendu entre deux chaises par les enfants de choeur et les invités mettaient la main à la poche pour déposer une pièce dans les assiettes disposées à cet effet.
   
  Puis, après les nombreuses embrassades et les voeux de bonîreûr, le cortège s'ordonnait à nouveau pour rejoindre le lieu
du festin. Car c'était bien d'un festin qu'il s'agissait. Le repas durait plusieurs heures et comportait de nombreux plats, très arrosés, dont plusieurs de viande, et se terminait au dessert, par le broyé poitevin, préparé à la maison et coupé en losanges, que beaucoup de convives, repus, rangeaient dans leur sac. Le déjeuner était égayé par ces belles chansons d'autrefois, comme "Le temps des cerises" ou "la chanson des blés d'or", qui font encore chaud au coeur des Anciens lorsqu'ils en parlent. Des conteurs, qui s'y étaient préparés, se faisaient tout juste un peu prier pour raconter des histoires lestes dont le patois relevait la saveur.
   
  Enfin, plus que rassasiés, certains l'allure un peu branlante, les invités sortaient dans la cour pour le jeu de la cruche. Celle-
ci, pleine de dragées et autres bonbons, était suspendue à une corde tendue entre deux arbres ou deux piquets, et déplacée à volonté par un compère qui tirait la ficelle. La mariée, les yeux bandés, devait casser la cruche à l'aide d'une gaule. Après plusieurs tentatives infructueuses, le tireur se faisait moins adroit et les friandises tombaient enfin sur le sol, à la grande joie des enfants.
   
  On se dirigeait ensuite vers la salle où se trouvaient soigneusement exposés les cadeaux margués au nom des donateurs.
Chacun pouvait y aller de son commentaire sur la générosité des uns ou la pingrerie des autres.
   
  Pendant ce temps, on avait écarté les tables et les chaises pour libérer la piste de danse où les jeunes (et des moins jeunes)
allaient s'ébattre de longues heures avant le repas du soir, la mère qui mariait son dernier enfant étant gratifiée d'une balayette accrochée dans son dos. Des hommes plus âgés organisaient des parties de guilles, de boules en bois ou de manille.
   
  Puis les agapes recommençaient, qui se prolongeaient fort tard dans la nuit. Un enfant était chargé de décrocher la
jarretière de la mariée, vendue ensuite aux enchères. Des jeunes gens, camarades des époux, venaient participer au dessert, puis au bal qui terminait la nuit. Les mariés, qui s'étaient éclipsés, étaient réveillés dans la matinée, par tous les jeunes qui leur apportaient, dans un pot de chambre, la soupe à l'oignon ou la crème au chocolat.
   
  Le lendemain dimanche, on "finissait les restes". Les plus âgés étaient partis, mais les autres étaient là, fatigués, les traits
tirés, bien décidés à terminer la noce en beauté. On mangeait, on buvait, on chantait, on riait, on faisait des farces à son voisin, on organisait des jeux. Le soir enfin, on se séparait, et si tout s'était très bien passé, si les invités étaient repartis bien repus et contents, alors on parlerait longtemps de ce mariage réussi où "il y avait de quoi" sur la table.
   
  Pour les baptêmes, à la sortie de l'église, les parrain et marraine lançaient sur la place des poignées de dragées que les
enfants, depuis longtemps à l'attente, se disputaient en courant de tous côtés.
   
  Le progrès matériel est si rapide maintenant et les inventions se succèdent à une telle cadence que la faculté
d'émerveillement de chacun, peut-être encore plus celle des jeunes, est très émoussée.
   
  Dans les années précédant la dernière guerre, les enfants couraient à la barrière de leur maison lorsque s'annonçait (par
son bruit) une voiture automobile. Sa vitesse faible, et pourtant si grande pour eux, leur permettait d'arriver à temps pour contempler cette merveille qui n'existait alors qu'à quelques exemplaires dans le village. Il n'en passait pas toujours une par jour, et les enfants faisaient leur partie de billes ou leurs glissades l'hiver, dans la rue même, plus souvent dérangés par une charrette que par une automobile. L'auteur se souvient encore d'être monté pour la première fois en 1938 dans la "traction avant" d'un parentoet d'avoir roulé dans une grande ligne droite de la route Mirebeau-Thénezay, à la vitesse fantastique de 100 km/heure, au grand effroi de la cousine qui tançait vertement son mari et lui prédisait la catastrophe.
   
  Les écoliers se rappellent encore avec quel élan ils se précipitaient à la fenêtre de la classe, malgré la crainte que leur
inspirait l'instituteur, Monsieur Ferdonnet, très sévère, pour contempler un point qui se déplaçait très haut dans le ciel et les faisait rêver pour longtemps, car l'occasion ne se représenterait peut-être plus avant plusieurs semaines. Le téléphone était un luxe inaccessible. Les nouvelles urgentes arrivaient par dépêches, portées dans les maisons par une personne que l'on voyait venir avec appréhension, car ces billets étaient souvent réservés à l'annonce des décès.
   
  Terminons en évoquant le souvenir de quelques métiers ou travaux disparus à Maisonneuve.
   
  Jusqu'avant la dernière guerre, le linge était nettoyé à la rivière chaque semaine, au lavoir dont le plus important (mis à
part le lavoir municipal construit en 1902) était situé le long de la Dive, en bas de la maison actuelle de Serge Métais, dans un trou d'une trentaine de mètres carrés alimenté par une source, au bord duquel on avait disposé des planches. Ayant amené leur linge entassé dans une brouette, les femmes le mouillaient, le frottaient vigoureusement avec du savon de Marseille puis le frappaient sur la planche à grands coups de battoir en bois pour en faire sortir la crasse. Il était ensuite rincé à l'eau claire et l'opération pouvait recommencer plusieurs fois si nécessaire. Le linge était ensuite mis à sécher sur un fil ou étendu sur l'herbe. Ce travail, très pénible, était aussi une occasion pour les femmes de se rencontrer et de se tenir ainsi au courant des nouvelles du village.
   
  Deux ou trois fois l'an, on entreprenait la grande lessive pour les draps, le linge de maison, les chemises de toile. Dans
une ponne au fond de laquelle on avait déposé un sac de cendre de bois passée au tamis, on disposait le linge qu'on arrosait d'eau froide, recueillie par un trou situé au bas du récipient. Cette eau, chauffée ensuite, était reversée plusieurs fois en haut de la ponne . On utilisait ainsi le principe de la lessiveuse. Le lendemain, le linge refroidi était rincé à l'eau claire, puis étendu pour sécher, souvent sur l'herbe d'un pré. Soigneusement rangé et empilé après son repassage, il faisait la fierté des ménagères. Même les gens peu fortunés mettaient un point d'honneur à avoir des armoires bien garnies. Il n'était pas rare qu'une famille possède plusieurs douzaines de draps de grosse toile d'une telle solidité que bien souvent les enfants en héritaient par la suite.
   
  Les cerneaux de noix, une fois secs, étaient portés chez l'huilier. Ecrasés à l'aide d'une meule de pierre, puis chauffés et
pressés dans un sac de toile, ils fournissaient une huile incomparable pour la dégustation d'une bonne salade. A la sortie de l'école, les enfants s'entassaient à la fenêtre de l'atelier pour quémander un morceau de "tourte" qu'ils obtenaient rarement. C'est pourquoi, à une certaine époque, l'amitié de Louis Boulin, enfant de la maison, était très recherchée, car il savait régaler ses camarades en cachette.
   
  Une autre figure sympathique, le "tambourineur" a disparu de notre village. De Charline (Pierre Fortuné) qui, au début
du siècle, faisait ses annonces à la sortie de la messe dominicale, juché sur une borne au coin de la maison du cordonnier Emile Villain, à Edmond Aguillon, dernier titulaire de la charge, en passant par Marcelin Soumelier, au roulement de tambour harmonieux car il avait pratiqué l'instrument dans l'armée, les Anciens ont connu de nombreux tambourineurs qui leur apportaient régulièrement les nouvelles officielles et, à l'occasion, s'arrêtaient pour converser ou boire un "petit coup de rouge".
   
  Un autre personnage bien connu à Maisonneuve jusqu'à une date récente était le distillateur. Du marc de raisin après
fermentation, mais aussi des fruits, principalement des prunes, il tirait de l'eau de vie. Le conseil municipal fixait l'emplacement où il devait s'installer, toujours en bordure de route et près d'une source d'eau. Pendant longtemps, ce fut à l'Arceau. Son arrivée devait être déclarée à l'administration qui exerçait un contrôle sévère sur la production d'alcool, celui-ci étant passible de lourdes taxes. Le distillateur restait rarement seul, certains habitués lui rendant visite pour faire la causette, plus sûrement pour se faire offrir une "petite goutte" .
   
  De tous temps, les paysans ont particulièrement craint les orages, générateurs de grêle, laquelle risque d'anéantir en
quelques instants les fruits d'un labeur de toute une année, quelquefois de plus longtemps encore s'il s'agit de la vigne. Aussi cherchent-ils à s'en protéger par tous les moyens. Dans certaines régions, on tirait des coups de canon. A Maisonneuve autrefois, on sonnait la grosse cloche, les ondes produites par le son étant censées éloigner le phénomène tant redouté. Pour sa rétribution, le sonneur passait chaque année dans les maisons où il était payé souvent en grain, chacun donnant en fonction de la vigueur de sa croyance en l'efficacité du procédé. Cet emploi a été tenu pour la dernière fois par Georgette Fortuné décédée en 1972 .
   
  De ces événements qui revenaient régulièrement au rythme des saisons, véritables fêtes pour les enfants, et de ces
métiers que la modernisation a fait disparaître, les Anciens gardent une grande nostalgie. La télévision installée dans chaque foyer, apporte une autre manière de se distraire, mais elle a détruit la convivialité d'antan et n'a pas fait oublier les veillées d'autrefois.
   
   
  M0NTGAUGUIER AUJOURD'HUI
   
   
 

LES BATIMENTS

   
   
  Dans la grande salle de la mairie de Maisonneuve, un agrandissement d'une photographie nous montre l'état des
bâtiments de la Commanderie au début du siècle. Laissons à un spécialiste le soin de les décrire. Voici ce qu'écrivait H. de la Rochebrochard dans la revue poitevine et saintongeaise en 1885, n° 6 :
   
    "On trouve maintenant à Montgauguier des bâtiments du XVIème siècle, défendus par de petites tours, et
  une chapelle romane, le tout formant une enceinte de 140 pas de périmètre. Les tours ont un diamètre de 3,45 mètres. Des traces de douves entourent la Commanderie. La porte, du côté de l'est, était à pont-levis. La partie de cette porte comprise entre les deux tours est beaucoup plus ancienne que le reste, et remonte à la fin du XlIIème siècle. Le cintre brisé, dont les deux extrémités apparaissent extérieurement dans les vides destinés à porter les branches du poht-levis, a ses deux naissances enclavées de telle sorte dans les murailles des tours, que ces tours ont certainement été construites postérieurement.
   
    La chapelle assez petite est romane dans toutes ses parties, excepté les deux fenêtres latérales modifiées au
  XVIème siècle. La voûte en est brisée, supportée par un seul arc doubleau également brisé. Il y avait primitivement une petite abside remplacée par un mur droit. Au dessus et tout le long de la corniche, des restes de peinture décorent la voûte depuis sa naissance jusqu'au tiers de son développement. Ce sont des scènes du Nouveau Testament. Comme couleurs, l'artiste paraît n'avoir utilisé que le rouge et le jaune. La fenêtre cintrée au-dessus de la porte produit intérieurement un fort bel effet, à cause de sa grande hauteur et de son ébrasement très accentué. La porte est romane, avec un cintre brisé et deux redoublements de voussures. Il ne reste plus de ses supports que le haut d'un chapiteau roman. Elle s'appuie maintenant sur deux petits murs droits élevés dessous, de chaque côté, pour remplacer les colonnes. Le mur du nord est percé d'une petite porte à cintre brisé."
   
  Cette description s'applique aux bâtiments qui sont toujours présents aujourd'hui, mais subissent lentement les blessures
du temps.
   
   
  LA PIERRE DE MONTGAUGUIER
   
   
  A la fin du siècle dernier, traînait dans la cour de la ferme de Montgauguier, un morceau de calcaire, peut-être ancien
retable d'autel, sculpté au XlIIème siècle. En 1900, le propriétaire des bâtiments, Aristide Mitault, maire de Chalandray, descendant par alliance de Louis Martin, fait don de cette curieuse pierre à la Société des antiquaires de l'ouest qui la cède plus tard au musée Sainte-Croix de Poitiers où elle se trouve aujourd'hui (documents n°18 et 18 bis). Elle a été étudiée par de nombreux érudits, comme le Révérend Père de la Croix, H. de la Rochebrochard, A. Richard, A. de la Bourelière, et beaucoup d'articles ont été écrits à son sujet. Voici celui du dernier cité, dans le BSAO n° 9, 2ème série de 1901.
   
    "Cette pierre est en calcaire très dur, mélangé à de nombreux fossiles siliceux gui en rendent la taille très
  difficile, parce qu'ils s'enlèvent par éclats sous le ciseau. D'après M. Welsch, professeur de géologie à l'Université de Poitiers, elle provient vraisemblablement des petites carrières situées vers Doux et Craon. Son épaisseur est d'environ 18 cm. Elle se présente sous la forme d'un rectangle ayant 76 cm de hauteur, 91 cm de largeur moyenne et muni, dans le bas à gauche, d'un prolongement de 50 cm de long sur 32 cm de haut. La partie droite a été éliminée dans toute sa hauteur par suite d'une cassure, et selon toute apparence, ce côté devait avoir un prolongement faisant le pendant de celui gui existe à gauche; si l'on tient compte d'une entaille ébauchée dans la tranche supérieure, comme ayant pu servir à l'ouvrier de point de repère pour marquer le milieu de la pierre, celle-ci dans son intégrité, aurait eu une longueur totale de 1,20 m pour la ligne du haut et de 2,20 m pour la ligne du bas, à cause de ses prolongements. La table évidée au centre de 2 à 3 cm est encadrée d'un tore et d'une bordure plate, mais la cassure a emporté cet encadrement à droite, et dans le bas le tore est remplacé par un simple chanfrein. Elle semble avoir été destinée à recevoir quelgues motifs de décoration; cependant nous n'y avons découvert aucune trace de peinture ni trou de gouge ayant permis d'y fixer une autre tablette de pierre ou de métal.
    Jusque là, rien de bien saillant, mais le prolongement dont nous avons parlé va nous intéresser
  davantage.
    Sur sa surface sont creusées peu profondément deux petites arcades cintrées, dont le fond plat porte des
  sculptures en très bas relief, d'une mauvaise facture et dans un état assez fruste. La première représente le Christ, vêtu d'une robe dont les longues manches recouvrent les bras étendus perpendiculairememt au corps. Deux petits personnages gui, sans nul doute, sont des anges, sont prosternés à ses pieds et paraissent l'adorer. Mais chose singulière, il n'y a pas de croix.
    C'est le divin crucifié cependant; tout l'indique, l'attitude du corps, la raideur des bras qui semblent fixés
  à l'instrument du supplice, l'adoration des anges. Et nous le répétons encore, parce que le fait est tout à fait remarguable : il n'y a pas de vestige de croix !
    La seconde arcade contient un guerrier du Moyen Age, à cheval, revêtu d'une cotte de mailles, coiffé d'un
  heaume conique et armé d'une lance qui dépasse le champ de l'arcade. Vu la provenance de la pierre, il n'y a pas de témérité à y voir un Templier. Mais un détail plus important nous arrête : le cavalier et sa monture ne sont pas dirigés vers le Christ; ils sont tournés dans le sens contraire et lui tournent le dos. Or, n'est-il pas de tradition et de règle dans nos monuments que, dans un ensemble de décorations, tous les personnages soient tournés vers la divinité, alors même qu'ils forment des groupes isolés ? Et ici, le cavalier n'est séparé du Christ que par l'étroit pilastre des deux arcades géminées.
    Il n'est pas douteux que le travail de cette pierre si étrange soit l'oeuvre du XIIIème siècle. Le costume du
  chevalier, certains détails de main d'oeuvre observés par le R.P. de la Croix, ne laissent guère d'hésitation à cet égard. On est plus embarrassé quand il s'agit d'en déterminer l'emploi. Aurait-elle servi de linteau à une porte ? La forme et ses dimensions ont fait penser aussi qu'elle aurait été le retable d'un autel. La chose est possible quoique aucune donnée positive ne vienne appuyer ces attributions."
   
 

Certains ont voulu expliquer l'absence de croix par le fait que les Templiers étaient hérétiques et attirés par le

manichéisme, religion rivale du christianisme jusqu'au Moyen Age; cette opinion est renforcée par l'attitude du chevalier représenté à la droite du Christ et qui lui tourne le dos. D'autres pensent que le Christ protège le Templier coiffé de son heaume et attaquant les Infidèles avec sa lance.
   
   
  HABITANTS MORTS POUR LA FRANCE ET PRISONNIERS DE GUERRE
   
   
 

HABITANTS MORTS POUR LA FRANCE

   
   
Guerre de Crimée (1854-1856)
   
  Jean Gaucher, 22 ans, grenadier au 1er bataillon du 42ème régiment de ligne, décédé à Kamiesch le 16 février 1856
   
Guerre du Mexique (1862-1867)
   
  Pierre Desgris, 25 ans, caporal à la 6ème compagnie du 1er régiment d'infanterie de marine, décédé à Veracruz le 22 septembre 1862
   
  Louis Marteau, 23 ans, soldat au 2ème régiment d'infanterie de marine, décédé sur le transport à vapeur "Le Japon", le
1er décembre 1863.
   

Guerre de 1870-1871

  Aucun décès
 
Guerre de 1914-1918
   
  Aguillon Désiré, soldat au 32ème RI, décédé le 25 août 1914
  Ayrault Roger, soldat au 85ème RI, décédé le 2 3 septembre 1918
  Bonnin Armand, soldat au 32ème RI, décédé le 5 novembre 1914
  Brothier Ernest, caporal au 32ème RI, décédé le 10 juin 1918
  Cointre Adrien, soldat au 32ème RI, décédé le 23 août 1914
  Dribault Aristide, soldat au 38ème R Tal I, décédé le 7 août 1918
  Dribault Edmond, sergent au 146ème RI, décédé le 25 septembre 1914
  Fortuné Bénédict, soldat au 169ème RI, décédé le 14 juillet 1915
  Gauthier Maurice, soldat au 17ème BCP, décédé le 29 janvier 1918
  Gauthier Xavier, soldat au 69ème R Tal I, décédé le 14 juillet 1916
  Gorin Etienne, soldat au 55ème RI, décédé le 13 juillet 1917
  Guillon Emmanuel, soldat au 32ème RI, décédé le 7 novembre 1916
  Huet Louis Agénor, sergent au 20ème BCP, décédé le 11 juin 1918
  Humeau Louis, soldat au 32ème RI, décédé le 30 août 1914
  Joubert Léon, soldat au 32ème RI, décédé le 29 avril 1915
  Lemoine Emile, soldat au 272ème RI, décédé le 10 juillet 1915
  Marcoux Emilien, soldat au 18ème BCP, décédé le 11 mai 1917
  Marteau Elie, soldat au 89ème RI, décédé le 7 avril 1915
  Martin Désiré, soldat au 327ème RI, décédé le 4 septembre 1916
  Martin Emile, caporal au 69ème RI, décédé le 22 août 1917
  Martin Valentin, soldat au 32ème RI, décédé le 25 octobre 1914
  Métais Emmanuel, soldat au 32ème RI, décédé le 18 octobre 1914
  Métais Pierre, caporal au 32ème RI, décédé le 24 décembre 1914
  Moreau Marcel, soldat au 32ème RI, décédé le 4 novembre 1914
  Popinet Siméon, soldat au 32ème RI, décédé le 18 décembre 1914
  Reverdy Alcide, soldat au 77ème RI, décédé le 28 septembre 1914
  Sarrazin Aléandre, soldat au 32ème RI, décédé le 21 octobre 1914
   
Guerre de 1939-1945
   
  Boussiquet Gaston, sergent à la 33ème Cie du Génie
  Noiraud Fernand, STO
   
  PRISONNIERS DE GUERRE EN 1939-1945
   
  Baudry Henri
  Blanchard Marcel
  Blanchard Narcisse
  Bonnin Fernand
  Boulin Camille
  Degout Raymond
  Fortuné Georges
  Gauche Albert
  Gaucher André
  Gauthier Etienne
  Gauthier Gaston
  Gauthier Marcel
  Gauthier Norbert
  Gourault Maximin
  Guyot René
  Joubert Raymond
  Le Texier Manuel
  Martin Abel
  Martin Paul
  Marteau Harlé
  Métais André
  Métais Norbert
  Métais Raymond
  Métayer Norbert
  Moreau André
  Popinet Marcel
  Sarrazin Edmond
  Sarrazin Marcel
  Sénéchault Maurice
  Soumelier André
  Tedde Napoléon
  Thiollet Julien
   
   
   
  CONCLUSION
   
   
 

Montgauguier a perdu son importance d'antan et n'est plus représenté que par un petit point sur les cartes

géographiques, mais des amoureux des vieilles pierres lui rendent encore quelquefois visite. Il ne possède plus guère que les restes d'un vieux château fort aux tours d'angle caractéristiques et une chapelle sans aucune grâce extérieure. Laissons pourtant courir notre imagination quelques instants...
   
  Voici les couvents de l'Ordre de Fontevraud : comme le calme y règne, si propice au rêve et à la méditation... Mais
que se passe-t-il donc ? Tout le monde s'affaire tout à coup. Des visiteurs viennent d'arriver. Ils se rendent en pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle et demandent asile pour la nuit. Il faut les héberger, les soigner. Nous sommes à la commanderie des Templiers... Tiens, le calme est revenu, on n'entend que des meuglements épisodiques : ce sont les vaches du fermier Jean Dribault qui réclament la traite. Il vit seul ici avec sa famille, dans ce grand château déserté depuis longtemps par les frères Hospitaliers... Soudain des ordres, des cris : la garde nationale s'installe avec ses prisonniers. La Révolution est en marche à Montgauguier, le nouveau propriétaire va arriver...
   
 

Pauillé n'a plus sa maison fortifiée, La Mothe-Bureau n'a conservé qu'une tour et quelques murailles, mais rêvons

encore... Voici la majestueuse abbesse de Sainte-Croix dans son carrosse, faisant l'inspection de son domaine, voilà le baron de Grisse qui visite son fief à cheval avec ses hommes, avant de rejoindre Mirebeau pour rendre hommage à son suzerain...
   
  La Guyardière a disparu, rêvons toujours... Voici la roue du moulin qui tourne sur la rivière de la fontaine des
Saules à La Mothe, des paysans qui apportent leur grain à moudre ou emportent la farine de baillarge qu'ils pétriront dans leur maie, d'autres qui, à une centaine de pas plus haut sur le chemin, déposent leurs pâtes au four banal ou y retirent ce pain si précieux qu'ils ont garde de n'en perdre aucune miette, voilà les nombreux pigeons de la fuye qui volètent aux alentours, suivis du regard peu amène des tenanciers qui enragent de devoir les nourrir et voudraient bien les voir disparaître...
   
  Mais fini le rêve, quittons l'époque révolue et retrouvons la réalité du présent : Montgauguier, Pauillé, La Mothe-
Bureau, La Guyardière ont laissé la place à. Maisonneuve qui vient de subir de plein fouet l'exode rural des jeunes, engendré par la révolution industrielle de l'après-guerre. La population de la commune a brutalement chuté à moins de 300 habitants mais on assiste depuis quelques années au retour de certains enfants du pays qui font construire des maisons pour y vivre leurs vieux jours, et d'anciennes demeures sont acquises et restaurées par des familles qui s'y installent. La grande Europe qui se met en place nous vaut même la présence d'étrangers qui viennent goûter à la douceur du climat poitevin.
   
  Espérons donc que, longtemps encore, notre village attirera des citadins lassés de la trépidation des villes
surpeuplées, et surtout que Maisonneuve, bien situé à l'écart des grands axes de circulation, restera, pour le bonheur de ses habitants, le havre si apprécié de calme et de paix qu'il a toujours été depuis des siècles.
   
  Maisonneuve, juin 1991
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