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  Jusqu'en 1700, les naissances sont très nombreuses, il n'est pas rare qu'une famille ait de 6 à 10 enfants. Mais il n'en reste
guère que la moitié d'entre eux qui atteignent l'âge de 10 ans.
   
  Ensuite la natalité a régulièrement et fortement diminué au cours des XVIIIème et XIXème siècles : de 20 en moyenne en
1700 pour une population de moins de 350 personnes, à 13 en 1880 pour près de 700 habitants.
   
  Contrairement au Moyen Age où les hommes se marient après 30 ans, mais les femmes très jeunes, en général avant 20 ans,
car à 25 ans on est alors vieille fille et on ne peut espérer convoler que si on apporte du bien avec soi, au XVIIIème siècle, le mariage est tardif pour les deux époux, le plus souvent après 25 ans, âge de la majorité. Sur 150 mariages étudiés, 90 % des hommes se sont mariés après 25 ans, les autres de 22 à 25 (un seul à 19 ans), 65 % des femmes se sont mariées après 25 ans, les autres après 20 ans (une seule à 19 ans). La période de fécondité est donc courte, mais les naissances sont rapprochées, souvent de 18 mois à 2 ans. Les femmes meurent assez fréquemment en couches, et les deuxième, troisième ou quatrième mariages ne sont pas rares. Les registres paroissiaux de Montgauguier en citent même, par deux fois, un septième mais on peut être sceptique, quant à la véracité de cette information.
   
  La moyenne de vie entre 1740 et 1789 est de 35 ans, et de 41 ans entre 1831 et 1880. Le progrès existe, mais il reste limité.
La mortalité infantile, surtout celle des nourrissons, est la cause principale de la faiblesse de cette moyenne jusqu'en 1880. Car de nombreuses personnes, lorsqu'elles ont dépassé les premières années, atteignent tout de même un âge avancé. Ainsi, voici en 1747 et 1757, l'âge des personnes décédées, dans l'ordre chronologique (le nombre 0 signifie : décès avant 6 mois).
 
En 1747 : 1 40 64 0 1 0 68 0 2 2 3 0 21 0 75
  2 68 1 0 60 1 12 17 4 9 0 5 1 2 0
  3 5 72 0 1 0 2 2 (soient 38 décès)
 
En 1757 : 24 2 67 50 60 67 54 40 53 63 77 74 (soient 12 décès)
 
                               
   
  L'énorme mortalité des enfants de moins de 10 ans en 1747 (28 sur 38) abaisse la moyenne de vie à 14 ans, alors qu'elle est
de 53 en 1757 avec un seul décès d'enfant.
   
 
De même, voici dans la troisième période citée au début de ce chapitre, trois années choisies de la manière suivante :
   
  1838 : moyenne de vie : 60 ans, la plus forte de toute la période.
   
 
1853 : moyenne de vie : 41 ans, soit la même que celle de la période complète.
   
 

1859 : moyenne de vie : 16 ans, la plus faible de toute la période.

 
En 1838 75 42 79 49 73 77 77 5 72 39 (soient 11 décès)
       
En 1853 7 1 77 79 0 76 0 24 0 58 0 67 (soient 12 décès)
       
En 1859 4 0 0 40 5 9 88 0 5 19 43 0 62    
0 3 8 48 30 3 49 71 3 1 4 0 1    
20 7 0 0 0 0 1 62 0 1 0 (soient 37 décès)
   
  Ce tableau montre clairement pourquoi la moyenne de vie varie tellement d'une année à l'autre; en 1838, un seul décès
d'enfant sur 11, en 1853, 6 sur 12, en 1859, 26 sur 37.
   
  Une étude faite sur la période 1930 - 1980, donnerait sans doute une moyenne de vie dépassant 60 ans. Ce fort
accroissement à partir du XXème siècle est à porter, pour une grande part, au crédit d'abord des découvertes de Pasteur, ensuite de la pénicilline et des autres antibiotiques.
   
   
  HABITAT
   
   
 
HABITAT DES ROTURIERS
   
   
  Dans la paroisse de Montgauguier, l'habitat n'est pas dispersé. Il n'existe pas de fermes isolées, à part peut-être Les
Fontaines Blanches, mais des hameaux rapprochés formés de plusieurs hébergements ou logis : Montgauguier, Maison-Neuve, Le Bourg-Bernard, La Valaille, Les Cartiers. Après la Révolution, Les Saules puis Pauillé, et enfin La Mothe-Bureau plus tard, viendront s'y ajouter.
   
 
De nombreuses déclarations mentionnent ces maisons :
  En 1564 :
   
    "Déclaration rendue à frère Charles Hesselin par Isaac Laigneau et Denis Blanchard d'un hébergement qui...
  se comporte en maison, cour, verger, ouche et issues, le tout se tenant, au village de Maisonneuve, au devoir de 16 boisseaux de froment et 2 s 4 d."
   
  En 1572 :
   
   

"Déclaration de René Boutin à l'abbesse de Sainte-Croix d'un hébergement au village de Pauillé, avec ses

  appartenances de cour et jardin, contenant 4 boisselées... au devoir de 11 s 4 d et une poule géline de cens rendable au jour de la Saint-Michel."
   
  En 1685 :
   
    "Déclaration par René Cloussié et René Dupuis, journaliers, d'un corps de logis, sis à Maisonneuve en Anjou,
  consistant en une chambre, antichambre, cellier, boutique, cour, coursoire, jardin, au devoir de 12 boisseaux de froment et 9 s 2 d."
   
  En 1720 :
   
    "Maison du chapelain de Maisonneuve consistant en chambre, appentis, cour, coursoire, fondis, masure,
  jardin, au devoir de 6 boisseaux de froment et 2 s 4 d."
      AV, 3H1, 546
   
  Le document n° 16 est une copie 'du premier cadastre de la commune de Montgauguier établi vers 1813. On peut
considérer qu'il donne une image fidèle de l'habitat juste avant la Révolution. On voit que la surface bâtie est nettement inférieure à la surface actuelle, peut-être à peine les 2/3. Les hameaux sont encore à peu près séparés, avec de grands vides à l'est de la Grand-Rue, à l'ouest de la rue de Mirebeau, au sud de celle des Saules. Il existe alors 140 à 150 feux pour 500 à 550 habitants. La densité de la population par mètre carré habitable, compte tenu de la faible surface des constructions, est donc très grande, près du triple de la densité actuelle.
  Les maisons sont très petites, composées souvent d'une seule pièce basse, au sol de terre battue, et gui sert à la fois de
cuisine et de chambre pour toute la famille, avec un grenier au-dessus, une grange attenante, une cour, quelquefois une coursoire. Peu d'autres bâtiments, car les animaux sont assez rares dans une région où l'on pratique surtout la culture des céréales et de la vigne. Voici un inventaire effectué en 1684 dans la maison d'un couple de nos ancêtres de la llème génération, Clément Besdain et Michelle Herboireau, décédés à Pauillé en laissant 5 enfants, dont 2 mineurs. Clément Besdain était maréchal mais aussi, comme la plupart des artisans, il cultivait la terre.
 
  "Chambre de la défunte :
     
    2 vieux chenets, ou landiers, de fer avec crémaillère
    un grand coffre, contenant deux devants de droguets et une paire de brassières de serge grise
    9 linceuls de grosse toile très usée de 3 aunes pièce
    2 tabliers ou nappes
    26 serviettes de grosse toile usée
    une armoire à 4 fenêtres contenant 13 chemises à l'usage des enfants et quelques petits linges et mouchoirs
    près de la cheminée, un lit garni d'une paillasse, deux couettes et son traversin de plume avec sa couverture de laine bure, une vieille chaise
    un autre lit garni comme le précédent
    une petite couchette de l'autre côté de la cheminée
    un garde-manger suspendu près de la cheminée
    un vieux coffre pour mettre le pain
    une table dont le tiroir contient :
    le contrat de mariage des défunts du 29 décembre 1650
    une obligation de 35 1 contre Jeanne Ayrault
    une obligation de 25 1 contre Jean Rivière
    de vieux poids à peser l'or et l'argent
    des quittances des aides pour les droits du vin vendu par les défunts
    deux méchants vieux bancs et deux tabourets
    52 livres de chanvre en poupées
    20 livres de fil de grosserie
    66 livres de vaisselle creuse et plate, fort usée
    3 poêles à lessive usés, contenant 10, 6 et 4 seaux
    3 chaudrons d'airain usés
    2 vieux chandeliers de cuivre
    2 poêles à frire et 2 poêlons avec une broche à rôtir
     
  Chambre à côté :
     
    un bois de lit garni de sa paillasse, couette et traversin de plume et couverture
    un vieux marchepied de fer
    un méchant buffet vieux et de peu de valeur
     
  Autre chambre :
     
    méchant bois de lit avec paillasse, couette, traversin et couverture
    un trépied dont l'un des pieds est cassé
    un vieux coffre vide
    un vieux marchepied
     
  Dans la grange :
     
    un tonneau et 3 barriques pleines de vin rouge et clairet
     
    [Sont ensuite inventoriés les outils de maréchal du défunt]
      AV, 2H1, 59
 
  Clément Besdain est maréchal et donc rémunéré pour son travail par sa clientèle. Mais les pièces de monnaie en or et argent
sont fréquemment limées par leurs possesseurs et perdent ainsi de leur valeur. Ce qui explique la présence, dans l'inventaire, de matériel pour les peser, car c'est leur masse, et non pas leur valeur nominale, qui est prise en compte. Cette obligation de contrôle gêne considérablement le développement du commerce.
   
 
Ce couple et ses 5 enfants sont bien logés, puisqu'ils disposent de 3 pièces avec 5 lits, mais ils n'ont qu'une seule
cheminée, car celle-ci sert d'abord à cuire les aliments et non à chauffer les chambres. Cet artisan est relativement aisé; il possède 60 1 d'économies au moins, cultive le chanvre et la vigne, vend du vin. Un inventaire du logis d'un journalier aurait montré un intérieur plus misérable.
   
  Les maisons sont très sombres et ont peu d'ouvertures. Ainsi sur 143 en 1806, 130 n'ont qu'une porte et une fenêtre au
maximum, certaines n'ont qu'une porte seulement. Il est vrai que l'on a créé à la Révolution, une imposition sur les portes et fenêtres et que, de même, jusqu'à une date récente encore, les taxes mobilières prenaient en compte le nombre de cheminées. Le confort était donc volontairement sacrifié pour limiter le montant des impôts.
   
  La cuisine se fait dans 1'âtre sur un trépied. La fumée s'échappe souvent à l'intérieur de la maison et noircit le plafond.
C'est autour de la cheminée que l'on se réunit les longs soirs d'hiver pour se raconter les histoires du temps passé, pour "trier" les noix, confectionner ou réparer les "lignes" à alouettes.
   
  Existe aussi souvent un petit jardin attenant à la maison, appelé courtil ou courtillage, entouré de murs de pierres sèches;
quelquefois une "ouche" plantée d'arbres fruitiers.
   
  Plusieurs ménages vivent fréquemment dans la même maison et il n'est pas rare que deux ou trois logis ouvrent sur la même
cour, ayant l'usage d'un puits commun. Celui-ci existait encore souvent il y a une quarantaine d'années avant l'installation de l'eau courante. De même lorsque le four banal disparaîtra, les habitants feront cuire leur pain dans des fours communs à plusieurs foyers.
   
  L'hygiène laisse fort à désirer. Le fumier est souvent placé dans la cour, devant la maison et quelquefois près... du puits. Là
encore, cette situation n'a évolué que lentement, et nous l'avons connue jusqu'à la dernière guerre.
   
  Les routes joignant les hameaux ou villages sont plutôt des chemins de terre; seules sont plus ou moins empierrées les
voies bordant les habitations. Leur entretien représentera de gros soucis pour les responsables municipaux jusqu'à une date récente.
   
   
 

HABITAT DES NOBLES

   
   
 
Les maisons nobles sont évidemment plus vastes et plus confortables.
   
  A Montgauguier, lorsque Louis Berland, intendant du Grand Prieur, loue le domaine à Jean Dribault, il procède avec lui à
une visite, le 20 février 1741, pour établir l'état des lieux. Il est impossible de donner ici ce très long inventaire de huit grandes pages, mais en voici un résumé (AV, 3H1, 546) :
   
  Les portes sont en bon état et ferment à l'aide de serrures en bois avec clefs. Les sols de la grande salle du château et de la
plupart des chambres (au nombre de 8, non comprises celles du garde et du fermier) sont recouverts de carreaux de terre cuite ou de pierre. Chague pièce a sa cheminée au foyer carrelé. Les plafonds sont en bois avec un grenier au dessus de toutes les pièces, et celles-ci ont une ou plusieurs fenêtres, souvent de grande dimension, avec des volets ou un grillage en fer.
   
  La chambre du garde possède une cheminée carrelée et un grenier au-dessus. Le fermier Dribault ne dispose que d'une
seule pièce au sol de terre battue, mais le foyer de la cheminée a des carreaux de terre cuite.
   
  De nombreuses constructions entourent la cour : une étable, une écurie, des toits à moutons, à porcs, plusieurs granges
dont l'une réservée aux terrages des tenanciers ; deux puits avec "timbre" de pierre. A l'intérieur, un four à cuire le pain, un pressoir de pierre, des tonneaux, barriques, "ponnes" à lessive.
   
  Tous ces bâtiments sont entourés de murs de pierres sèches, avec un grand portail à deux vantaux, très solide, muni d'un
gros verrou.
   
  Et un colombier blanchi à la chaux, un jardin, une garenne, une "ouche" près du cimetière, le tout ceint de grands fossés.
Les douves du château existent encore, mais il y pousse des ormeaux.
   
  L'inventaire des bâtiments de La Guyardière nous est donné par cette déclaration du début du XVIIIème siècle :
   
    "... la maison noble de La Guyardière, consistant en chambres, grenier, salle basse, cuisine, four, fourniou,
  hautes et basses chambres, cuvier, cellier, cave, granges avec quatre tours étant autour, renfermée de grands fossés, basse-cour, jardin treille avec une fuye étant dedans... au devoir de 24 boisseaux de cens à la Saint-Michel.
... Plus le dit sieur de La Mothe doit à cause de son moulin qui autrefois tournait par eau, qui est renfermé dans un coin de la coursoire dudit lieu de La Guyardière : au devoir de 12 boisseaux de froment à la Saint-Michel."
      AV, 3H1, registre 473
   
   
   
  COMMUNAUTE DES HABITANTS DE CHERVES - MONTGAUGUIER
   
   
 

CREATION DE LA COMMUNAUTE DE MONTGAUGUIER

   
  En 1781, le Conseil d'Etat publie l'arrêté suivant :
   
    "Le Roi, s'étant rendu compte de la position respective des paroisses de Montgauguier et de Cherves situées
  dans l'élection de Richelieu, Sa Majesté a reconnu que la première de ces deux paroisses étant d'une étendue fort considérable pourrait former une communauté distincte de celle de Cherves à laquelle elle se trouvait réunie, et qu'il y aurait des avantages à espérer de cette désunion pour la facilité de la répartition et du recouvrement. Sa Majesté s'est assurée d'ailleurs des circonstances particulières qui pouvaient appuyer la demande en désunion des habitants de Montgauguier par un procès-verbal des dires et moyens respectifs, tant des habitants que de ceux de Cherves. Et Sa Majesté voulait faire connaître à cet égard ses intentions... Ordonne Sa Majesté qu'à compter de l'année prochaine 1782, la paroisse de Montgauguier formera une communauté distincte de celle de Cherves, et qu'en conséquence ladite commune aura ses syndics et ses collecteurs particuliers... Ordonne Sa Majesté que la distinction du territoire quant au temporel sera faite en conformité de celle qui existe depuis longtemps au spirituel entre la paroisse de Cherves et celle de Montgauguier et sa succursale du bourg de Maisonneuve. Ordonne Sa Majesté qu'il sera procédé incessamment au dépouillement des rôles de la paroisse de Cherves d'après lequel l'Intendant fixera... le montant de la taille de chacune de ces deux communautés, le tout aux frais des habitants de Montgauguier.
    Fait en Conseil d'Etat du Roi, Sa Majesté y étant tenue, à Versailles le 19 mars 1781." AV, 3H1 liasse 546
   
 

Ainsi est créée officiellement la communauté des habitants de Montgauguier, à la demande de ceux-ci. Elle vivra peu de

temps, puisqu'en 1787, ces communautés seront remplacées par des corps municipaux élus. Pour en être membre, il faut payer au moins 10 1 d'impôt, et pour y avoir des responsabilités, 30 1 et être âgé de plus de 25 ans. Le peuple est donc écarté du pouvoir municipal concentré entre les mains des bourgeois, qui seront d'ailleurs les grands bénéficiaires de la Révolution toute proche.
   
  Nous avons vu que les fréresches (ou fresches) d'origine très ancienne, sont des communautés, souvent familiales, de
roturiers qui s'associent pour cultiver les terres, payer les redevances et défendre leurs intérêts. Peu à peu, au Moyen Age, les habitants d'une même paroisse prennent l'habitude de s'assembler pour discuter des événements importants qui les concernent. Ainsi naissent les communautés d'habitants, ancêtres de nos communes. Le pouvoir favorise cette création qui lui permet une meilleure rentrée des impôts, comme le souligne sans ambages ce passage du texte ci-dessus :
   
    "... il y aurait des avantages à espérer de cette désunion pour la facilité de la répartition et du recouvrement..."
   
   
 

ASSEMBLEE GENERALE : SA COMPOSITION

   
   
  Chaque fois que cela est nécessaire, la communauté se réunit en assemblée générale "au son de la cloche, devant la porte de
l'église, à la manière accoutumée". Elle est formée des chefs de famille qui ont un métier ou possèdent quelques biens. Les femmes peuvent en être membres si elles remplacent leur mari ou si elles sont seules et propriétaires. C'est "l'assemblée générale des manants et habitants de la paroisse". Elle ne fait pas de distinction entre pauvres et riches, seuls les nobles n'y participent pas. La présence aux réunions n'est pas obligatoire, mais si l'on juge le nombre de personnes insuffisant pour délibérer valablement, on ajourne et convoque l'assemblée pour une autre date. Fréquemment, c'est le curé qui annonce au prône la réunion qui se tient souvent après la messe, ce qui laisse penser qu'alors les présences sont nombreuses.
   
  Dans les comptes-rendus, on cite toujours un certain nombre de personnes qui sont censées représenter les autres
habitants de la paroisse. Dans le terrier de 1747, l'acte rédigé le 17 décembre 1730 indique que vingt tenanciers (laboureurs, journaliers, artisans) ont représenté tous les autres pour reconnaître les droits du Commandeur sur ses propriétés de Montgauguier et autres fiefs.
   
 
Les pouvoirs civils et religieux étant étroitement liés, l'assemblée générale est aussi bien celle des habitants que celle des
paroissiens, donc sous l'autorité de 1'Evêque comme de l'Intendant. Pour la représenter, elle nomme différents administrateurs :
   
  1) Le syndic , sorte de maire, élu à main levée par l'assemblée (sauf entre 1702 et 1717 où la charge s'achète, comme celle
d'un notaire, ce qui permet de faire entrer de l'argent dans les caisses de l'Etat, vidées par les guerres très dispendieuses de Louis XIV). Il exerce les pouvoirs "civils" de l'assemblée sous son contrôle : gestion des biens communs, s'il y en a, entretien des chemins, nomination des corvéeurs, ouverture des foires et marchés, nomination du garde champêtre, rétribution du maître d'école (quand il existe), demande de réduction des impôts en cas de calamités, représentation de l'assemblée en justice, etc..
   
 
2) Les fabriqueurs (ou fabriciens) qui forment le conseil de fabrique (ou fabrice), chargés de gérer les biens de l'église. Ils
décident des réparations et constructions (église, sacristie, presbytère, cimetière...), de l'installation des cloches, du prix des sépultures, de la place et du prix des bancs, de la rétribution du vicaire, etc..
   
  Les fabriques, supprimées par la Révolution, sont rétablies par le Premier Consul au Concordat de 1801, comme
""établissements civils. Le curé et le maire en deviennent membres de droit, les autres fabriciens étant élus. Ensuite une loi de 1884 oblige les communes à fournir un logement au curé et à pourvoir, en cas d'insuffisance de ressources de la fabrique, aux réparations de l'église et du presbytère. Les comptes sont alors contrôlés par le conseil municipal. A Montgauguier, les délibérations de celui-ci en signalent l'étude régulière. Par exemple, le 28 mai 1891 :
   
    "Monsieur le maire donne connaissance des comptes de la fabrique pour l'exercice 1890 et du budget de ce
  même établissement pour 1892... Le conseil municipal, après en avoir délibéré et examiné les pièces qui lui sont soumises, les approuve à la majorité des membres présents."
   
  Les fabriques seront supprimées en 1905 par la loi de séparation des Eglises et de l'Etat.
   
  3) Les collecteurs d'impôts. Sous l'Ancien Régime, la taille, sorte d'impôt sur le revenu, n'est pas fixée individuellement,
mais forfaitairement pour chaque paroisse. A l'assemblée des habitants de se débrouiller ensuite. Elle nomme donc des collecteurs pour en faire la répartition et le recouvrement. Fonction importante, peu ou pas rémunérée, mais qu'il est impossible de refuser.
N'importe qui peut être désigné, gros ou petit laboureur, journalier, artisan, marchand, vicaire. Les collecteurs décident donc du montant de l'impôt dû par chaque foyer, puis doivent le percevoir en se présentant chez l'habitant. Ils sont souvent mal accueillis, chacun se plaignant d'être surimposé, et reçoivent parfois plus d'insultes que d'argent. Et s'il y a réclamation devant l'assemblée, celle-ci ne soutient pas toujours le collecteur qu'elle a nommé, responsable sur ses propres biens de la bonne rentrée des impôts. Inutile de dire que la fonction est extrêmement redoutée et que ceux qui ont la malchance d'être désignés, n'ont de cesse d'en être déchargés. Quelquefois, si elle est un peu rémunérée, leur charge peut être cédée à une autre personne, souvent le sergent de la seigneurie.
   
  L'assemblée générale des habitants contrôle la gestion des administrateurs qu'elle a nommés. Le notaire seigneurial assiste
à chaque réunion et en dresse le procès-verbal souvent rédigé à l'avance; mais l'assemblée ne respecte pas toujours les décisions inscrites et il lui arrive de les faire modifier.
   
  Les principaux sujets de délibération concernent surtout les impôts : réclamations de contribuables qui s'estiment surtaxés
ou d'autres qui ont le malheur d'habiter dans une paroisse et d'avoir des biens dans une autre, si bien qu'ils peuvent se retrouver imposés dans les deux. Dans ce cas, il arrive que l'assemblée fasse la sourde oreille si toutefois elle peut délibérer, car bien souvent ses membres "se sont tous absentés". Ainsi le 20 juillet 1698 :
   
    "André Pain, demeurant à Puisan, fait assigner les habitants de la paroisse de Thénezay et ensemble les
  habitants de la paroisse de Cherves pour voir dire qu'il sera rayé et biffé de dessus les rôles de l'une ou l'autre desdites paroisses pour la taille de l'année présente..."
   
    "Assemblées générales des habitants de Thénezay" par le chanoine Vigue
   
  L'assemblée de Thénezay rejette la demande et maintient l'imposition. Il aurait été très intéressant de connaître la décision
de celle de Cherves.
   
  L'assemblée, par l'intermédiaire du syndic, défend les intérêts de la communauté devant les tribunaux, en particulier devant
la cour des Aides qui s'occupe de toutes les causes relatives aux impôts : taillé, capitation, gabelle, aides,...
   
  Jusqu'en 1781 inclus, Cherves et Montgauguier ne forment qu'une seule paroisse au temporel et n'ont donc qu'une seule
communauté d'habitants. L'assemblée générale commune se réunit devant l'église du prieuré de Cherves, dépendant de l'abbaye de Sainte-Croix. Et c'est là que sont faites les annonces officielles pour notre paroisse, par exemple celle de la saisie des biens du curé Nicolas Aymereau (voir documents n°9 et 9 bis ) :
   
    "... L'on fait à savoir qu'à la requête de Clément Boullin, marchand commissaire établi au régime et
  gouvernement des fruits et domaines saisis sur Messire Nicolas Aymereau, à la requête de Monsieur le procureur fiscal de la seigneurie de Montgauguier...
    Le 28 septembre 1687, la présente publication a été faite par moi, sergent royal soussigné, résidant a Latillé
  et y immatriculé à Saint-Maixent, à l'issue de la messe paroissiale de Cherves, à la porte de l'église dudit lieu..."
      AV, 3 Hl, 558
   
  Mais le Commandeur, ou son représentant, peut provoquer une réunion des habitants de Montgauguier devant leur église,
lorsqu'il le juge utile à ses intérêts.
   
   
 

LITIGE ANDRE METAIS - ASSEMBLEE GENERALE

   
   
  A partir de 1758, s'engage entre l'abbaye de Sainte-Croix et son fermier du prieuré d'une part, et les "syndic, manants et
habitants de la paroisse de Cherves" d'autre part, un long et curieux procès qui intéresse évidemment les habitants de Montgauguier et de Pauillé, membres de la communauté; la cause en est parfaitement expliquée dans la supplique suivante adressée par les demandeurs à l'intendant de la Généralité de Tours en septembre 1759 :
   
    "Marie Anne DESCARS de PERUSSE, abbesse de Sainte-Croix, et André Métais son fermier de Cherves, vous
  remontrent, Monseigneur, que de l'Abbaye dépendent des dîmes qui se perçoivent dans l'étendue de la paroisse de Cherves en Anjou, lesquelles elle a affermées à André Métais. Quoique ce particulier demeure à Cherves, son domicile est en Poitou, pays rédimé. Les habitants et collecteurs de la paroisse l'ont compris dans la taxe du sel pour l'exploitation de sa ferme à raison de 5 quarts de sel par an pendant les années 1756, 1757, 1758, 1759, ce qui a obligé Métais à se plaindre de cette taxe, ainsi que la suppliante qui est intervenue dans l'instance pendante à Mirebeau..."
      AV, 2H1 liasse 62
   
  L'Abbesse et son fermier profitent ici d'une particularité de Cherves (et de Pauillé) : la paroisse est située "partie en Anjou,
partie en Poitou, pays rédimé", ce qui signifie que cette dernière province s'étant libérée de la gabelle sous Henri II, moyennant le paiement d'une grosse somme d'argent, les Poitevins ne paient plus d'impôt sur le sel, au contraire des Angevins. Et si les terres qu'exploite André Métais sont en Anjou, lui habite en Poitou.
   
  Le 10 avril 1758, le Grenier à sel de Mirebeau (juridiction qui juge en première instance les différends relatifs à la gabelle)
rend une sentence qui donne raison à 1'Abbesse et son fermier :
   
    "... à la suite d'une signification faite à la requête de André Métais à Jean Caillault, tant pour lui que pour ses
  consorts collecteurs de l'impôt sur le sel de l'année 1756... de l'extrait du rôle du sel de la paroisse de Cherves de 1756, 1757, 1758, du procès-verbal fait à la requête de Laurent Brothier et ses consorts, collecteurs du sel de Cherves en 1757... des moyens fournis par lesdits gyndic, manants et habitants...
    Nous avons ordonné que les taxes faites sur 1'Abbesse et son fermier... seront rayées et biffées du rôle...
    Faisons dispense aux susdits habitants et collecteurs de les taxer et imposer à l'avenir...
    Ordonnons que les sommes payées par ledit Métais... lui seront rendues... pour obtenir une imposition sur le
  général des habitants... que nous condamnons aux dépens liquidés à la somme de 54 1 16 s.
    Fait à Mirebeau le 10 avril 1758" AV, 2H1, liasse 62
 
  Le 8 mai 1759, la cour des Aides à Paris confirme la sentence avec amende de 12 1, malgré les arguments ci-dessous,
avancés par le syndic de Cherves :
   
    "Tant les fruits que les terrages, devoirs et dîmes dûs au prieuré de Cherves sont véritablement dans le bourg
  de Cherves, en Anjou, pays de gabelle...
    La déclaration faite au greffe de Mirebeau est donc nulle, fausse et frauduleuse"
      AV, 2H1, liasse 62
   
  Le 1er juin 1759, la cour des Aides décide :
   
    "Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre...  
    A la supplique de M.A. DESCARS de PERUSSE et son fermier, demandons contraindre... les syndic,
  manants et habitants de Cherves au paiement de la somme de 249 1 17 s 14 d... Ladite somme sera réimposée sur le général des habitants... à la manière accoutumée.
    Donné à la cour des Aides, le 1er juin de l'an de grâce 1759 et de notre règne le 44ème"
      AV, 2H1, liasse 62
   
  Le 2 juillet 1759, l'huissier royal signifie au syndic de Cherves les trois pièces de justice citées ci-dessus (se faisant payer 12
1 9 s 3 d.
   
  Ensuite, le syndic a dû faire appel, puisque l'intendant de la Généralité de Tours a statué, après le dépôt de la supplique de
septembre 1759, citée ci-dessus.
   
    "Le 21 décembre 1759, à la requête de dame... et André Métais..., j'ai, huissier soussigné, donné copie aux
  syndic, manants et habitants de Cherves, d'une requête de Monsieur l'Intendant... en date du 17 juillet... en vertu de laquelle j'ai fait sommation aux syndic, manants et habitants... de s'assembler dimanche prochain..."
      AV, 2H1, liasse 62
   
  Le syndic est alors Alexis Métais; il paie 9 1 15 s à l'huissier pour son travail.
   
  Le 22 février 1760, nouvelle sentence de l'intendant de Tours, cette fois, largement en faveur des habitants de Cherves :
   
    ... Vu la requête présentée par André Métais... demandant qu'imposition sera faite sur le général de la
  communauté de Cherves de la somme de 395 1..."
    Tout considéré... déboutons le suppliant de sa demande... La créance sur les habitants est réduite à 49 1 4 s..."
      AV, 2H1, liasse 62
   
  La somme réclamée par le fermier avait considérablement augmenté mais les habitants ont remporté un très grand succès,
puisque le montant du remboursement a été réduit de beaucoup. Remarquons l'absence de l'Abbesse dans cette requête. Est-ce faire preuve de mauvais esprit de penser que ceci explique peut-être cela ?
   
  Mais la victoire des paroissiens de Cherves - Montgauguier est de courte durée. Nouvel arrêt de la cour des Aides le 10
mars 1761 :
   
    "Louis, par la grâce...  
    Savoir faisons que, vu la requête présentée par M.A. DESCARS de PERUSSSE et son fermier...
    La Cour ordonne que son arrêt du 18 mai 1759... décerné au profit des suppliants contre les habitants de
  Cherves... sera exécuté...
    En conséquence, au commissaire de la généralité de Tours... de contraindre par toutes les voies de droit, six
  des principaux habitants de la paroisse de Cherves, au choix du suppliant, pour le paiement de toutes les sommes à lui adjugées...
    Donné à Paris le lOème jour de l'an de grâce 1761 et de notre règne le 45ème"
      AV, 2H1, liasse 62
   
  On est donc revenu au point de départ. Pour nous, ce feuilleton s'achève là, mais est-il véritablement terminé ? Si oui, les
habitants de Montgauguier et de Pauillé ont été obligés de verser leur quote-part de la somme imposée.
   
  C'est tout de même un curieux arrêt que rend la cour des Aides gui, pour s'assurer de l'exécution de la sentence, fait
prendre en otages six des principaux habitants de la paroisse. Gageons que André Métais ne s'est pas fait des amis en les choisissant. Et si ceux-ci ont finalement payé, ont-ils été remboursés facilement par les autres paroissiens ? On peut en douter.
   
  Sur le fond, remarquons aussi la différence essentielle avec le droit actuel. Maintenant les biens sont imposés suivant les
modalités du lieu où ils existent, et non du domicile de leur propriétaire. Alors que dans ce procès André Métais qui exploite des terres situées en Anjou, province soumise à la gabelle, arrive à se faire exempter de celle-ci parce qu'il habite en Poitou, qui en est dispensé.
   
   
  LES FAUX-SAUNIERS
   
   
  Cette proximité de la frontière entre les deux provinces fait de notre région un lieu privilégié pour la contrebande du sel. On
peut réaliser de gros bénéfices en en achetant en Poitou pour le revendre en Anjou, mais les risques sont grands, car la justice est sévère pour les faux-sauniers. Ainsi ce jugement de la cour de Saumur dans le ressort de laquelle se trouve notre région :
   
    "Nous, commissaire du Conseil susdit, par jugement souverain et en dernier recours... avons déclaré ledit
  Julien Gillet, dit Tirpense, journalier... dûment atteint et convaincu du crime de faux-saunage à cheval... Pour réparation de quoi l'avons condamné à servir comme forçat sur les galères du Roi l'espace de 5 années consécutives, préalablement marqué sur l'épaule dextre d'un fer chaud portant l'empreinte des lettres GAL qui lui seront imprimées par l'exécuteur de la haute justice. Lui faisons défense de rompre son banc à peine de la hart..."
      RP de Champigny-le-Sec
   
  La peine de la hart était la pendaison.
   
 

Voici un jugement plus impitoyable. Mais il est vrai qu'il s'agit cette fois d'un employé chargé de pourchasser les faux-

sauniers, une sorte de douanier aidant les contrebandiers (ce que l'on appellerait maintenant un "ripou").
   
    "Nous, commissaire du Conseil susdit, par jugement... avons déclaré ledit Michel Guesdon, ci-devant
  lieutenant de la brigade... dûment atteint et convaincu... d'infidélité et prévarication dans les fonctions de son emploi en livrant passage aux faux-sauniers à prix d'argent. Pour réparation de quoi... avons condamné ledit Michel Guesdon à être pendu et étranglé jusqu'à ce que mort s'ensuive à une potence qui sera, à cet effet, dressée sur la place publique... par l'exécuteur de la haute justice, ayant un écriteau devant et derrière, portant ces mots en gros caractères : "Employé infidèle et prévaricateur"
      RP de Champigny-le-Sec
   
 
La gabelle sera supprimée en mars 1790, les aides en mars 1791.
   
   
  REPARTITION DE LA DIME
   
   
  Après l'arrêt du Conseil d'Etat de 1781, donnant entière autonomie à la paroisse de Montgauguier et lui permettant de créer
une communauté d'habitants, la répartition de la dîme entre Cherves et Montgauguier va pouvoir enfin être parfaitement déterminée. Le 23 décembre 1783, une transaction intervient :
   
    "Par devant les notaires royaux à Poitiers, furent présents : Très illustre et très révérende dame Louise Claude
  de Bourbon-Busset, abbesse de Sainte-Croix de Poitiers, en qualité de dame spirituelle, temporelle et codécimatrice générale de la paroisse de Cherves, partie en Anjou, partie en Poitou, et Messire François Descours, curé de la paroisse de Cherves, codécimateur avec ladite dame d'une part Et Messire Jean-Baptiste Bersange, curé de la paroisse de Montgauguier d'autre part Lesquelles parties pour éteindre et terminer le procès existant entre elles à la sénéchaussée de Poitiers, sont convenues de la transaction ci-après..."
      AV, 2H1, liasse 62
   
   

Les deux parties s'accordent pour faire arpenter les terres en litige. Ce gui est effectué le 13 septembre 1784

  par Marc Prieur, notaire arpenteur juré de la ville de Mirebeau, résidant au bourg de Cherves. Quant à la dîme du prieuré de Cherves, 1'Abbesse et le curé continueront à se la partager "comme par le passé, chacun par moitié". Partage jusque-là difficile d'ailleurs, puisque sous l'abbatiat de Marie Anne Descars de Pérusse décédée en 1779, un procès était en cours avec le curé de Cherves, lequel procès durera jusqu'en 1781, date à laquelle interviendra un accord avec la nouvelle abbesse Louise Claude de Bourbon-Busset.
   
   
  IA VIE ECONOMIQUE
   
   
 

LES PROFESSIONS

   
   
  On ne trouve plus de nobles à Montgauguier et Pauillé après le départ des chevaliers, à part Paul Maillard de Grand-
Maison, de petite noblesse, gui vient s'y installer avant 1670, ayant probablement quitté l'armée de Louis XIV parce qu'il est protestant (l'Edit de Nantes sera révoqué en 1685). Il n'y a pas comme dans les paroisses voisines, des seigneurs laïques, car Montgauguier et Pauillé appartiennent à l'ordre de Malte et à l'abbaye de Sainte-Croix, seigneuries ecclésiastiques dont les titulaires, Commandeur et Abbesse, résident à Poitiers.
   
  Le clergé est seulement représenté à Montgauguier d'abord par un vicaire, puis par un curé à partir de 1651, peut-être de
souche aisée comme le curé Jacques, mais tout de même issu du peuple ou de la petite bourgeoisie, et un chapelain à certaines époques à Maisonneuve.
   
  La population est donc roturière et toute l'activité de la paroisse dépend de la terre, soit directement par les paysans qui
l'exploitent, soit indirectement par les artisans, marchands ou quelques professions dites maintenant "libérales".
   
  Pour connaître les métiers des habitants de Montgauguier, il faut se reporter aux registres paroissiaux. Les curés, en effet,
indiquent parfois la profession des personnes citées dans les actes. Mais ils ne le font pas tous régulièrement et systématiquement. Ainsi le curé Delisle est beaucoup plus attentif à cette mention gue ses deux successeurs. Nous avons donc choisi une période de 25 ans, de 1701 à 1725, pendant laquelle exerçait ce curé, pour faire cette étude. Le métier des personnes décédées étant rarement mentionné, et dans les baptêmes seul celui du père étant noté, nous avons choisi les mariages, dans lesquels, outre la profession du marié, sont aussi quelquefois indiquées celles de son père et de son beau-père. Car, bien entendu à cette époque, seuls les hommes en ont une, même si les femmes travaillent autant ou plus qu'eux. Sur un total de 141 mariages, le curé Delisle a indiqué les métiers de 150 personnes. En voici la liste, avec pour chaque profession le nombre et le pourcentage.
 
journalier 84 56,0 % chirurgien 1 0,7 %
laboureur 22 14,5 % notaire 1 0,7 %
tisserand 15 10,0 % cabaretier 1 0,7 %
charpentier 5 3,4 % boulanger 1 0,7 %
domestique 4 2,7 % sacristain 1 0,7 %
maçon 3 2,0 % sergent 1 0,7 %
cordonnier 3 2,0 % artiste peintre 1 0,7 %
sabotier 3 2,0 % marchand droguiste 1 0,7 %
meunier 3 2,0 %      
           
  Bien sûr, il mangue quelques professions, comme celles de maréchal ou de menuisier, soit parce qu'aucune personne les
exerçant ne s'est mariée pendant cette période, soit plutôt parce qu'elles n'ont pas été mentionnées.
   
  Le travail de la terre est effectué par les laboureurs et les journaliers auxquels il faut ajouter quelques domestiques, et à
certaines époques, un métayer à Montgauguier ou Pauillé.
   
  Le laboureur est un paysan gui possède une charrue et une certaine superficie de terre en tenure. Il en a donc la propriété
"utile" et paie les redevances au seigneur. L'étude des différents terriers de la Commanderie, comme ceux de 1668, 1712, 1730, un plan grossier trouvé aux archives de Poitiers (voir document n° 6), montrent le morcellement du sol. Les champs sont souvent très petits, quelquefois de moins d'une boisselée. Les laboureurs possèdent donc plusieurs pièces de terre, souvent éloignées l'une de l'autre. Leur nom même recouvre des situations, donc des conditions de vie, gui peuvent être très différentes. La majorité d'entre eux ne cultivent que l'équivalent de quelques hectares seulement et peuvent posséder en plus un petit cheptel, surtout moutons et porcs, et des volailles. Nous disposons d'un inventaire fait chez un laboureur en 1697 à Pauillé : Mathurin Mestais et son épouse sont décédés et laisse une fille mineure Renée. Le voici dans son intégralité :
 
  - une charrette à mule, le tiers usée et estimée
20 1
  - un fumier de 10 à 12 charrettes
10 1
  - 40 boisseaux de froment à 17 s le boisseau
34 1
  - une cuve à vin à demi usée, 3 vieux fûts
5 1
  - une charretée de pâture, moitié foin, moitié paille
8 1
  - 2 petites mules de poil châtain
60 1
  - un arreau à un soc, une fourche à trois doigts de fer
2 1
  - environ 4 sacs à lessive de pommes de terre
2 1
  - 8 brebis, jeunes et vieilles, à 25 s pièce
10 1
  - un bois de lit garni de sa paillasse, couette et couverture
6 1
  - un autre bois de lit garni de façon identique  
4 1
  - une vieille armoire à une fenêtre  
2 1
  - une chaise en noyer  
1 1
10 s
  - 6 livres de vaisselle d'étain commun à 8 s la livre  
2 1
8 s
  - un chaudron, un seau, un poêlon, une marmite, une. cuillère  
5 1
  - une paire de vieux chenets, une crémaillère  
1 1
10 s
  - un poêle à lessive contenant 6 seaux d'eau  
10 1
  - un devant de serge noire, deux jupes, une couverture  
10 1
  - un justaucorps, une paire de culottes, quelques vieux atours  
4 1
  - 5 chemises d'hommes de grosse toile  
4 1
dans la grange  
  - 5 livres de laine blanche à 16 s la livre  
4 1
le grenier    
  - 52 boisseaux de froment à 17 s le boisseau dans  
44
1 4 s
  - 84 boisseaux de blé et baillarge à 6 s le boisseau  
25
1 4 s
  - 15 boisseaux de vieille baillarge à 6 s  
4 1
10 s
papiers    
 

- un contrat de bail à rente à Pierre Doucin de Saint-Loup du 10-2-1658

  - une obligation au profit de Grégoire Réau de 44 1 du 9-3-1658  
 

- un arrentement de 6 1 fait à Pierre Charron de Saint-Loup du 6-10-1690

 

- un contrat de mariage de Pierre Réau et Paule Mestais du 5-2-1648

  - un mémoire de ce que le dit feu a fait pour François Dubois de 22 1 12s  
         
 

Le défunt a déclaré aux témoins avant de mourir qu'il devait de l'argent à plusieurs personnes et que son intention était de

payer :      
         
  - à Jacques Mestais le contenu de deux obligations      
  - à Monsieur Richeteau, conseiller au présidial de Poitiers, quelque chose pour des arrérages de ferme
  - à Louis Thiollet de La Touche, deux arrérages de la maison qu'il habite
  - à René Marteau de Montgauguier, pour des souliers qu'il a fournis
  - à la dame Mestais, marchande à l'enseigne du "Dauphin" à Latillé, pour du sel et autres marchandises
  - à Jacques Gauthier de Maisonneuve pour quelques journées de faucheux
  - à Jacques Bigot de Maisonneuve pour quelques journées de plusieurs choses
  - à Laurent Bichon, texier, pour de la façon de toile
  - aux collecteurs de Cherves pour la taille et la capitation
  - à Hilaire Chaigneau de Véluché, dont il ne sait plus la cause
  - à Jacques Mousseau, charronnier à Vouzailles, pour deux façons de roues de charrette
  - à François Guignard, maréchal à Seran, pour quelques ferronnages
  - à la veuve de feu René Mestais, tailleur à Maisonneuve, pour deux habits
  - à Denis Mestais, hôtelier à l'enseigne du "vin", à la Cueille à Poitiers pour 10 s
 
  Les parents déclarent qu'il faut payer les frais funéraires au sieur curé, au vicaire, au sacristain de Cherves, aux deux
chirurgiens qui ont soigné ledit feu pendant sa dernière maladie, à celui qui a fait la bière, à la femme qui l'a enseveli : 20 s.
   
  Outre, le feu a demandé que, pour récompenser sa mère qui s'est occupée de sa maison depuis que sa femme est
décédée, il lui soit donné 2 setiers de froment.
   
  Jacques Mestais, marchand à l'enseigne de la "Croix blanche" à Vouzailles demande à être payé :
   
  - des obligations du 4-4-1693 dans lesquelles le feu lui devait 26 boisseaux de froment et 17 de baillarge, mesure de Mirebeau, à la Toussaint 1693, et de la somme de 24 1 payable à la même date.
   
  - la valeur de 4 moutons et 6 livres de laine fournis il y a 4 ans.
 
   
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